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Suis-je un paumé? par Amokrane Nourdine(Boghni) 2013

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Paumé.
Je suis, depuis, maintenant bien longtemps assez paumé. Même si parfois, je vis des moments de grande conscience. Sans pleurer et m’apitoyer sur ce que je suis devenu : rangé et rongé de l’intérieur de mon être. Comme tous les gens du peuple revenus de leurs illusions, de s’en sortir vraiment. Un proche, m’avait, une fois, surpris par sa réplique : « vous n’avez pas beaucoup d’ambition ». Mon interlocuteur n’était pas sorti de saint Cyr mais travaille à l’A.P.C (nouvelle dénomination des mairies dans l’Algérie postindépendance).
C’est certain, que depuis mon retour d’exil, je n’avais pas entrepris quoi que ce soit en mon pays. La réussite pour beaucoup d’entre nous, reste au-delà des mers. J’avais en quelques sortes un peu réussi, d’avoir quitté mon pays ; à l’époque, une autorisation de sortie du territoire national, délivrée par les autorités était nécessaire. Et le parcours de combattant des plus pénibles pour l’avoir. La réussite, c’était pour moi, là bas, par delà les mers chez les « civilisés ». Nous étions comme ces gens de l’Est de l’Europe, du temps du mur de Berlin, rêvant des libertés occidentales…
N’est ce pas, que bien, de gens du Sud continuent encore aujourd’hui à gagner des galons, en notoriété en pays d’Europe ! Et d’avoir raté « ma place au soleil » m’avait rendu, en quelques sortes, un peu fou, blessé profondément. Même si je convenais en mon for intérieur, que ma place reste au milieu des miens de conditions modestes ; l’existence de toute « élite » n’EST que dans le maintien de beaucoup dans l’extrême dénuement. Et cela même, en ces nations de Grande Culture.
Dieu sait combien--moi, je me croyais sauvé--, le sort des plus démunis tourmentait mon jeune âge, me laissant épouser les remous de la permanente tristesse. « Lugubre » disait-on autour de moi lorsque je revenais constamment sur les injustices subies par les plus démunis, les guerres atroces. Mon entourage affectionnait les blagues ; les blagueurs étaient prisés, écoutés solennellement avant les fous rires libérateurs.
Si je m’étais pris tant la tête pour les malheurs du monde, si je me soucie tant des plus démunis, la raison reste que je suis issu d’un milieu similaire, de conditions des plus modestes. Et de surcroît, marqué par un père occupé d’abord, à guerroyer en Europe contre les nazis avant de s’engager, avec le F.L.N (front de libération algérien) algérien, dans son combat pour la libération du pays des griffes de la quatrième puissance mondiale. Cela avait il déteint sur notre modeste petite famille ? Un sacrifice au détriment de ma famille ! N’a t –on point glosé tant et tant sur ces révolutionnaires algériens planqués à Oujda (Maroc), en disant qu’ils s’étaient planqués, avant de prendre les rênes du pays !
Je suis né dans une famille modeste, durant la guerre d’Algérie, avec aussi cette foi, de sortir un jour des ténèbres et de vaincre, ceux qui étaient sensés « nous apporter les lumières »
Comme, avant mon départ pour l’exil, et aujourd’hui bien des années après mon retour, je reste toujours paumé. Quelles en sont les raisons me dirait le plus futé d’entre vous ? Je répondrais en évoquant d’abord ma fragilité. Même si je le suis moins après avoir ouvert petit à petit les yeux, les luttes de certains en mon pays libérant le peuple longtemps sevré de parler. Frêle et chétif, j’avais toujours craint les poings, dans une société qui valorise aussi, la force physique, celle des armes et les puissances de l’argent. Alors les pertes de foi de gravir un jour les échelons de l’échelle sociale ? Cela me laissant sans croire à cette formation solide que j’avais entamé, désarmé par mon passé…
Aujourd’hui, bien des Arrivés ou pas, conviendraient avec moi, que des forces, valorisant la puissance physique et des armes au détriment du mérite, ont tiré de tout temps le peuple et le pays vers le bas. L’Etat des lieux étant des plus déplorables. Cinquante ans, après l’indépendance de 1962, le spectacle affligeant de scandales de corruption à répétition.
Sommes-nous nés, en Algérie, condamnés à vivre avec ce péché originel : la trahison de la révolution des braves, un jour de novembre 1954 ?
Nous, fragiles, nous ne reviendrons jamais d’avoir été trahi par ceux éhontés qui avaient détourné, la révolution algérienne de son cours naturel, en sevrant le peuple, le contraignant par la force, laissant la plupart d’entre nous désorientés
De Boghni le 26/02/2013
Amokrane Nourdine


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