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Le pouvoir d’une instruction
Il aura fallu attendre que l’argent devienne une denrée rare pour que le gouvernement endosse un costume de comptable et de gendarme à la fois.
Quand la monnaie coulait à flots grâce au prix vertigineux du baril de pétrole, l’inquiétude n’était pas de mise et les passe-droits pour des importations tous azimuts admissibles étaient accordées, sinon tolérées. Cette pratique a fini par asseoir une organisation avec des complicités à tous les niveaux du process : de la banque à la douane en passant par le registre du commerce, les réseaux influents et souvent, en bout de course, un prête-nom.
Le chiffre d’affaires était si fulgurant que plusieurs investisseurs ont abandonné l’acte de production pour se reconvertir en importateurs de “conteneurs”. Au lieu de faire face à des ouvriers de plus en plus intransigeants, aux impôts et charges multiples, ils ont cédé à la facilité qui ne requiert qu’un bureau ou un téléphone. Le résultat est que le tissu productif s’est rétréci comme une peau de chagrin et que les quelques véritables investisseurs créateurs d’emplois et de richesses se démènent encore dans un environnement bureaucratique.
Le tableau de bord, de plus en plus catastrophique, a poussé le Premier ministre à sortir de sa réserve et à tancer ses ministres et quelques institutions par une instruction qui n’y va pas par quatre chemins. Le ton est dur et l’avertissement a l’air d’une menace. Il avoue qu’il y a des failles dans le système de contrôle existant et des complicités diverses dans toute la chaîne des importations frauduleuses qui causent “des préjudices appréciables” à l’économie nationale. L’évasion fiscale, par exemple, est devenue une pratique normale dans l’acte d’importer sous différents subterfuges. Pour reprendre l’expression de Louisa Hanoune, ils sont en train de siphonner le pays quand bien même ce dernier serait en réelle difficulté financière.
Mais une instruction suffira-t-elle à mettre à genoux une organisation passée experte dans le commerce informel, et ce, depuis quelques dizaines d’années ?
Abrous Outoudert