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Toutes ces choses que je n'ai pas dites : un livre paru aux éditions Amazon de Si Hadj Mohand Abdenour

Mon mari est un mordu de la chasse. Il lui arrivait de s'oublier en poursuivant les nombreux gibiers qui sortaient de leurs refuges  après que le silence et l'obscurité compacte de la nuit s'installâtent. Image may be NSFW.
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Guerdja est ce flanc de coteau du col de Tizi Bouirene, bien exposé au soleil et faisant face au village Ahdouche. La végétation y est dense et variée. C’est un véritable paradis de vergers de fruits et légumes. Plusieurs sources y sourdent, fraiches et limpides. De jour, cette région est habitée par les bruits des humains, les cris d'enfants, les appels des femmes, et parfois les complaintes des paysans en mal de divertissement. La route carrossable et la rivière qui descend jusqu'a Acif Naouana, prennent en sandwich les vastes surfaces arables pourtant bien inclinées sans être escapées. Les parcelles de terrain y sont bien balisées a cet endroit ou chacun protège son bien avec de hautes haies naturelles renforcées avec des piquets en fer et du fil de fer en guise de barbelés.

La nuit, le vacarme des humains et le soleil resplendissant font place aux bruits furtifs, aux langages tumultueux et musicaux des animaux sauvages. C’est ce moment propice que choisit mon époux Achour, armé de son fusil de chasse, dissimulé derrière un arbre ou un gros rocher ou encore sous une haie touffue, attend sa proie.

Souvent, ce sont de gros sangliers qui viennent à sa rencontre. Mais ce qui l'attirait le plus ce sont les perdrix, ou encore ces gros volatils qui se déplacent d'un arbre a un autre avec force cris et bruits d'ailes battant l'air et les feuillages. Les lièvres et les porc-épiques sont également présents mais tres discrets et méfiants. Un monde peuplé de curiosités et de chants mélodiques. Un véritable paradis ou l'on s'oublie, et se régénère des épreuves de la vie des hommes et des femmes trop complexe et stressante. Image may be NSFW.
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Achour, lui, Il lui arrivait de poursuivre ses gibiers sur plusieurs mètres avant de l'abandonner aux multiples refuges camouflés sous de hauts buissons impénétrables.

Mais mon mari était, devenu par la force de l'entrainement et de l'habitude un chasseur efficace. En effet il ne se passait pas un  soir sans qu'il revienne avec sa gibecière pleine de gibiers de toutes sortes d’où débordent souvent des tètes de perdrix, des pattes de lièvres ou encore des  fuseaux de porc épique.

Un jour comme il s'en trouve d'autres dans l'année, Mon mari en revenant de sa partie de chasse, empruntant l'unique ruelle qui traverse en le coupant le village de part en part en son milieu, il devait comme a l’accoutumée, pour rejoindre sa demeure, passer devant le seuil de la mosquée. Une mosquée vieille de plus de deux siècles, dont la construction n'obéit a aucune forme d'architecture mais qui disposait de toutes les commodités et infrastructures traditionnelles : une cour en forme de balcon qui surplombe quelques villages construits sur l'Adret, un vieux minaret en forme de parallélépipède qui pointe son nez au dessus de toutes les maisons du village, surmonté d'une coupole ronde avec des trous disposés au quatre points cardinaux pour permettre a l'appel du muezzin de se disperser sur un rayon de 360 degrés.

Arrivé devant la porte d'entrée de la mosquée il etait deja minuit. En cheminant sur la ruelle du village, des jets de pierres le ciblaient visiblement et donc certains l'atteignirent sans le blesser. De qui s'agit-il au juste, se posa la question, mon mari, devant ce fait insolite?! Y a t il vraiment quelqu'un, caché dans cette mosquée,  et très motivé, pour lui tendre un guet apens? Cherchait-t-il vraiment  l'atteindre, ou bien avait-il juste l'intention de l'effrayer, histoire de se distraire en observant sa réaction? S’agirait-il d'un plaisantin qui chercherait à créer la panique devant sa victime, pour se donner un motif de railler mon époux, secrètement, devant les gens du village en leur racontant cette mésaventure?

Figé sur place, observant un moment de réflexion en retenant son souffle, l'œil vigilent, et les oreilles en alerte maximum pour voir d’où venaient les projectiles et s'il pouvait entendre un quelconque bruit de pas ou un souffle d'une respiration, mais rien a faire. Les jets de pierres continuaient de le viser sans les voir, dans la nuit compacte. Il décida alors de partir à la recherche de cet individu mystérieux qui l'intriguait par ces agissements insolites. Braquant son fusil de chasse devant lui, le système de sécurité  déverrouillé, le chien de son arme en position de percuter la balle. Il entra a l’intérieur de la mosquée, mais le noir de la nuit ne lui permettait de distinguer la présence éventuelle d’une personne, ni même celle des objets. Le voila maintenant au centre de la salle de prière qu'il trouva vide. Aucune présence ni humaine ni animale, pas même le moindre meuble ou objet. Dans la pièce attenante, d'une superficie très réduite et d'une hauteur d’à peine deux mètres ou sont entreposés deux corbillards, un bruit insolite en sortit  mais dont mon mari n'arrivait pas à reconnaitre l'origine. S’agit-il de bruits de pas, ou bien d'un meuble que l'homme caché dans cette mosquée aurait bousculé sur son passage? Rien de tout cela. Mon mari, en s'approchant de plus en plus de la source du bruit, finit par pénétrer dans la petite salle ou se trouvent les deux corbillards. La, le spectacle qui s'offrait a lui le paralysa net. Les deux corbillards s'entrechoquaient dans un bruit lugubre, en dansant comme des fantômes mus par une main invisible dans un bruit fracassant. La danse des corbillards, et le bruit assourdissants de ces sortes de caissons en bois le plantèrent de stupeur. Il observa, presque inconscient, hypnotisé, le mouvement d'ensemble, rythmé, de la bousculade que se livraient les corbillards sans que l'un ou l'autre ne semble prendre le dessus. Un véritable combat que se livraient les corbillards d’ou fusaient le bruit de caisses en bois secs qui vibrent dans les nerfs de mon mari pour finir comme une sorte de big bang dans son cerveau.

Il n'eut aucun moment la présence d'esprit ou la lucidité nécessaire pour comprendre de quoi il s'agit, tant le phénomène était inédit, insolite, brutal, imprévu. Il ne pouvait savoir combien cela avait duré. Il avait perdu la maitrise de ses sens et le controle de ses émotions. l’adrénaline qui inonda brusquement son systeme circulatoire le dopa un instant au point de le transformer en un véritable robot insensible aux excitations de son environnement. Il ne pouvait même plus penser a cet individu qui le harcelait a coup de pierres, il y avait juste quelques minutes. La scène qu’il vit maintenant le vida de ses souvenirs comme si son cerveau était formaté.

Reprenant, l'espace de quelques secondes ses esprits, il comprit qu’il réalisa qu'il était a l’intérieur de la mosquée, et donc, déduit machinalement que sa maison n'était pas loin. La configuration de son espace vital était ancrée définitivement dans son cerveau depuis son enfance. Ne sachant pas s’il rêvait ou s’il vivait un moment de réalité de sa vie, dans un ultime effort de concentration et de mouvement, il sortit de la mosquée, longeant toujours l’unique ruelle du village qui le traverse de part en part, il tomba net devant l'entrée de sa maison. Il pénétra presque en pas de charge, avec l'impression qu'il était poursuivi. Chez lui il trouva tous les membres de la famille assoupis. Seul le bruit et les souffles ordonnés des moutons lui parvenaient de l'adainine, partie de la demeure occupée par le bétail.

Sans prendre la peine de diner, ni de se changer, il s'allongea sur son lit, à coté de son épouse qu’il ne prit pas la peine de réveiller. La fièvre s'installa dans son corps, il continua son aventure en cauchemardant le reste de la nuit et une bonne partie de la matinée.Quand il se reveilla, il etait deja onze heures du matin.


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