Memoires de prisonniers algeriens en France
Une peine de prison quelque qu’elle soit est insupportable, mais ce qui agit sur le moral d’un homme en prison, c'est d’être obligé de vivre avec des hommes de tous les milieux. Il y a longtemps que je désirais écrire quelques souvenirs de ma détention dans les prisons de France; malheureusement, l’état de ma santé ne me permet point. Aussi ce qui suit n'est qu’un résumé de ce que j’ai vu et entendu depuis mon arrivée au Sanatorium pénitentiaire.
C’est le 2 novembre 1959 que je suis arrivé ici avec deux compatriotes : « T », ancien condamné a mort et « A » qui, lui, n'avait été condamné qu’a une peine de dix-huit mois de prison. Des notre arrivée, nous fûmes séparés. « T » et moi, nous avons été affectés au BT 3, tandis que notre compatriote « A » est affecté lui au BT 2. Nous avons demandé et insisté « T » et moi auprès du surveillant de la famille pour qu’il ne nous sépare pas. Mais il nous dit que notre compatriote « A » étant bacillaire, il ne pouvait rester avec nous. Nous fumes aussi déçus de ne trouver aucun comité de detention, Comme il n'existe dans toutes les prisons ou il y a des détenus FLN. Mais comme nous avons trouvé un compatriote que nous connaissions avant notre arrestation; nous lui avons demandé la raison pour laquelle aucun comité n’avait été constitué.
La raison est simple, Lorsque ce compatriote qui se prénomme Tahar avait demandé une audience a la Direction, le directeur lui a dit qu’ici tous les détenus sont des malades et que chacun ne devait s’occuper que de sa santé. Le Sous-directeur a parait-il ajouté qu’il connaissait parfaitement notre discipline. Mais qu’ici les détenus ne devaient être soumis à aucune pression. En outre, certains militants auraient écrit à la Direction pour se plaindre du comportement de certains dirigeants. Le Directeur a aussi dit à Tahar que les détenus ici sont sous la seule responsabilité de la direction et des médecins.
Tahar m'a aussi expliqué qu’il y avait ici des militants qui jouaient aux cartes et buvaient de la bière.
J'ai demandé à Tahar la raison pour laquelle les militants ne désignaient pas un dirigeant pour l'ensemble des deux bâtiments. Mais il me répondait que chaque militant se disant être un responsable quelconque avant son arrestation, personne ne voulait écouter les conseils d’un autre, encore moins des ordres. En plus m'a-t-il dit, aussitôt qu’un militant se présente à la direction au nom de tous les frères, il est catalogué de « meneur » et transféré une ou deux semaines apres. Le principal me dit encore Tahar, c’était de maintenir chaque détenu algérien a sa place, afin d’éviter les histoires et les bagarres.
Apres quelques semaines d’observation, je me suis aperçu que les militants se critiquaient les uns les autres. Il était courant d’entendre un militant cataloguer un autre de « Khabite ».
Le bâtiment étant partagé en six dortoirs. Tahar avait désigné un militant pour chaque dortoir afin qu’il prêche la bonne entente et fasse observer tous les jours une minute de silence a la mémoire des frères morts pour la libération de notre mère patrie.
Apres plusieurs semaines d’efforts, nous avons réussi Tahar et moi à interdire à tous les détenus algériens les jeux et la bière.
a suivre
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